À la fin de ce sujet, l’étudiant devrait être capable de :
La motivation au changement chez les personnes traitées pour un trouble lié à l’utilisation de substances est une des préoccupations centrales des prestataires de services.
Selon le Centre for Subsance Abuse Treatment (1999), bien que la motivation soit considérée comme une condition préalable au traitement, la manière dont ce phénomène est compris a grandement changé.
Le concept de motivation a évolué, mais aussi la perception selon laquelle la responsabilité de la réussite du traitement incombe uniquement à la personne.
Nous savons désormais que :
Le prestataire a pour tâche de susciter et d’accroître la motivation.
(Center for Substance Abuse Treatment, 1999, Chapter 1, p. 2)
La motivation au changement est maintenant vue comme volontaire et orientée vers le meilleur intérêt de la personne, selon ses propres critères.
Le Center for Substance Abuse Treatment (1999) a défini les caractéristiques suivantes de la motivation :
la motivation se rapporte tant aux envies et aux désirs d’une personne qu’à des facteurs sociaux, culturels, spirituels et financiers. Ensemble, ces variables influencent la perception de la personne quant aux risques et aux avantages associés à ses comportements.
La motivation est un phénomène fluide qui varie selon la situation et l’état cognitif. Elle fait l’objet de doutes et peut varier en intensité.
Même si la motivation est un processus interne et personnel, elle est influencée par les expériences de la personne avec les autres (Miller, 1995). La motivation au changement d’une personne peut donc être influencée par des variables sociales positives ou négatives, dont les relations avec la famille, les amis et les pairs, mais aussi par l’expérience de traumatismes ou de violence. L’accès aux soins, l’emploi, la perception populaire du mauvais usage de substances, la stigmatisation, la discrimination et le traumatisme historique peuvent aussi considérablement jouer sur la motivation d’une personne.
La motivation est « [Traduction]... accessible et peut être modifiée ou accrue à bien des étapes du processus de changement, ce qui permet de l’aborder avec espoir et optimiste. » (Center for Substance Abuse Treatment, 1999, p. 3). Ainsi, une personne peut participer activement au processus de changement même en continuant de faire l’usage de substances.
Le Center for Substance Abuse and Treatment (1999) insiste sur l’importance du rôle de la relation thérapeutique dans le traitement et souligne les résultats de recherche qui suivent :
Le taux d’abandon des clients pour un mode de traitement donné a été lié au conseiller qui fournissait le traitement plutôt qu’à l’approche adoptée.
Le style de conseiller influence la réponse du client à une intervention et a un plus grand effet sur les résultats que les caractéristiques propres au client.
Pour favoriser l’obtention de résultats positifs, une alliance respectueuse et positive avec le client et de bonnes aptitudes interpersonnelles sont plus importantes que la formation professionnelle ou l’expérience.
Selon un certain nombre d’études, les conseillers ou thérapeutes démontrant une « forte empathie » ont un meilleur taux de réussite avec les clients dépendants que ceux qui ont « peu d’empathie » et recourent à une approche antagoniste (Moyers et Miller, 2013).
Ce « peu d’empathie » parmi les conseillers a été associé à « [Traduction]... un taux de rechute élevé, de faibles alliances thérapeutiques et peu de changement chez les clients » (Moyer et Miller, 2013, p. 878).
Bien que de nombreuses personnes modifient elles-mêmes leur comportement en matière d’utilisation de substances sans intervention thérapeutique, les prestataires de soins de santé et de services sociaux peuvent augmenter leur motivation au changement positif tout au long du processus de traitement.
Aider et encourager les personnes à reconnaître un comportement problématique compte parmi les aspects clés d’une relation thérapeutique. Une personne peut ressentir de la tension et du malaise lorsque ses comportements ne reflètent pas ses valeurs et croyances. Cette situation peut entraîner des changements de comportement, mais plus souvent des changements de croyances, comme la rationalisation des comportements ou le déni de leurs conséquences.
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Il peut être utile de s’attarder à la dissonance cognitive lorsque l’on conseille une personne qui fait l’usage de substances.
Les prestataires de services peuvent adopter une approche distale ou globale pour accroître la motivation lorsque des facteurs historiques, sociaux ou culturels nuisant à la capacité d’une personne à changer sont détectés ou nommés.
DÉFINITION
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Dans sa théorie du sentiment d’autoefficacité, Bandura (1999) relève quatre sources de connaissance de ses propres capacités :
Bandura appelle « expériences de maîtrise » des occasions où une personne connaît un succès. Les petites réussites augmentent le sentiment de maîtrise sur les habitudes ou les choix dont la personne souhaite s’abstenir.
Bandura suggère que le fait d’observer la réussite d’autres personnes, comme des pairs, augmente la croyance en sa propre capacité de réussir. Ainsi, en étant en présence de pairs qui ont terminé leur traitement ou réussi à s’abstenir de consommer, la personne est encouragée à croire en ses chances de succès.
L’encouragement verbal de personnes influentes, comme un aîné, un mentor, un pair ou un conseiller, peut également augmenter le sentiment d’autoefficacité. Le fait de dire à quelqu’un qu’il a la capacité, la détermination ou les compétences pour atteindre un objectif, disons la sobriété, peut renforcer sa croyance en sa capacité de réussir.
Les émotions positives, même en situation de stress et d’anxiété, peuvent renforcer la croyance d’une personne en sa capacité d’accomplir un objectif. Le prestataire de soins de santé et de services sociaux peut donc améliorer le sentiment d’autoefficacité en encourageant le recours à des stratégies d’adaptation positives au stress, à la dépression et à l’anxiété.
(Bandura et al. 1999)
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En parcourant une étude sur le sentiment d’autoefficacité en matière d’abstinence, Kadden et Litt (2011) ont conclu que c’était un indicateur important des résultats de traitement (p. 3). Voici leurs conclusions :
Les étapes du processus de changement du modèle transthéorique créé par Prochaska et DiClemente (1983) fournissent une illustration communément acceptée du processus de changement en lien avec l’usage de substances. Vous trouverez ci-dessous une description des six étapes illustrées par ce modèle.
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(Pacheco, 2012)
Pour la plupart des personnes qui font l’usage de substances, la progression d’une étape à l’autre est par nature circulaire ou spirale, et non linéaire. Dans ce modèle, la rechute est un événement normal, car de nombreux clients repassent plusieurs fois par différentes étapes avant de parvenir à un changement stable.
L’acronyme SBIRT signifie screening (dépistage), brief intervention (intervention ponctuelle) et referral to treatment (orientation vers le traitement); cette approche est grandement employée dans divers milieux de traitement non liés à un mauvais usage de substances, comme les écoles, les services sociaux, les établissements de soins primaires et les salles d’urgence.
Voici une description des composantes de cette approche (Academic ED SBIRT Research Collaborative, 2007) :
Pour appliquer l’approche SBIRT, les prestataires de services doivent absolument avoir été formés à ses éléments fondamentaux de dépistage, d’intervention ponctuelle et d’orientation.
Il existe un certain nombre de manuels et d’outils de dépistage associés à l’approche SBIRT.
D’abord utilisées dans le domaine de l’utilisation de substances, les techniques d’entrevue motivationnelle ont été adaptées à divers contextes. L’entrevue motivationnelle est une intervention ponctuelle selon le modèle SBIRT. Elle s’appuie sur quatre principes :
L’objectif de l’entrevue motivationnelle n’est pas d’orienter le comportement, d’enseigner une compétence ni de fournir un élément d’information prédéfini, mais plutôt d’évaluer et de renforcer la motivation d’une personne. De plus en plus d’études se penchent sur l’efficacité des techniques d’entrevue motivationnelle. La plupart des preuves soutenant les techniques d’entrevue motivationnelle proviennent toutefois du domaine de la consommation d’alcool; très peu d’études s’attardent directement à ces techniques en contexte d’usage d’opioïdes (DiClemente et al., 2017).
Pour plus de détails, veuillez consulter les outils pour les cliniciens.
Elles ont été employées dans diverses communautés auprès de personnes présentant un usage de substances problématique.
Elles comprennent le dépistage et assurent le lien d’un niveau de traitement à l’autre (c.-à-d., intervention ponctuelle, traitement ponctuel et orientation vers un traitement spécialisé).
Elles sont effectuées dans plusieurs milieux non spécialisés (p. ex., santé publique, soins primaires, services d’urgence et de traumatologie, cliniques de santé communautaire, écoles).
Elles requièrent du personnel formé (p. ex., éducateurs-pairs en santé, professionnels en dépendance, conseillers en santé comportementale).
Plusieurs documents et programmes permettent de soutenir les éléments de formation, d’implantation et d’assurance-qualité liés aux interventions.
Des études démontrent une réduction de la consommation risquée d’alcool chez les adultes; de plus en plus de preuves démontrent aussi une réduction de l’usage risqué de drogues chez les adultes. Chez les jeunes, cette efficacité commence à être évaluée. Un biais de sélection (des personnes qui acceptent de subir un dépistage) limite ces études.
(Academic ED SBIRT Research Collaborative, 2007)
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