Objectifs d’apprentissage

À la fin de ce sujet, l’étudiant devrait être en mesure de :

  • Discuter des effets de la religiosité et de la spiritualité sur l’usage d’opioïdes.
  • Décrire les réactions émotionnelles associées à l’usage d’opioïdes.
  • Décrire les répercussions mentales et psychologiques de l’usage d’opioïdes.
  • Décrire les effets physiques immédiats et à long terme de l’usage d’opioïdes.

Concepts clés

  • Les données préliminaires d’une étude américaine suggèrent une relation inverse entre la religiosité ou la spiritualité et les troubles liés à l’utilisation de substances.
  • Il est ressorti de groupes de discussion que la spiritualité et les pratiques religieuses étaient influencées de manière complexe chez les personnes ayant un trouble lié à l’utilisation d’opioïdes, mais utiles lors du rétablissement.
  • Des études qualitatives sur les expériences d’utilisation d’opioïdes ont relevé des effets positifs et négatifs de l’utilisation de drogues; cependant, les effets positifs tendent à surpasser les négatifs. Comparativement aux effets physiologiques des opioïdes, les émotions négatives liées à l’utilisation d’opioïdes étaient grandement associées à des aspects socioculturels.
  • Une étude américaine a révélé que les adultes souffrant de troubles de santé mentale (trouble d’anxiété et trouble de l’humeur) étaient plus susceptibles d’utiliser des opioïdes et de continuer les traitements aux opioïdes à long terme.
  • Bien qu’ils ne représentent que 16% de la population, les adultes souffrant de trouble de santé mentale aux États-Unis comptent pour 51% de toutes les ordonnances d’opioïdes au pays.
  • Une dose quotidienne élevée d’opioïdes sur ordonnance est associée à un risque plus élevé de surdose et d’importants problèmes de santé, notamment de fractures, de dépendance aux opioïdes, d’occlusion intestinale et de sédation.

Effets spirituels des opioïdes

Les données préliminaires d’une étude suggèrent une relation inverse entre la religiosité ou la spiritualité et les troubles liés à l’utilisation de substances aux États-Unis. Cette relation n’était pas atténuée par le soutien social ni l’état de santé mentale, ce qui suggère une corrélation indépendante entre les deux facteurs (Edlund et al., 2010).

  • Un meilleur bien-être spirituel est associé à une réduction des rechutes chez les personnes ayant un trouble lié à l’utilisation d’opioïdes et pourrait contribuer à de meilleurs résultats en matière de rétablissement et un meilleur état de santé mentale.
  • La douleur chronique peut nuire au bien-être spirituel, et des personnes ont indiqué que la sensation de somnolence découlant des opioïdes les a éloignées de leurs obligations spirituelles. Ce phénomène pourrait créer un cercle vicieux où une diminution du bien-être spirituel augmente la sensation de douleur chronique et la dépendance aux opioïdes.
  • Par contre, les personnes étant en mesure de gérer leur douleur chronique à l’aide d’opioïdes mentionnent avoir respecté leurs obligations spirituelles.
  • Selon une recension systématique du recours aux interventions psychosociales pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’opioïdes, les traitements complets tenant compte de la personne dans son ensemble et de ses croyances ont obtenu de meilleurs résultats (Dugosh et al., 2016).
  • Il est ressorti de groupes de discussion que la spiritualité et les pratiques religieuses étaient influencées de manière complexe chez les personnes ayant trouble lié à l’utilisation d’opioïdes, mais utiles lors du rétablissement (Heinz et al., 2010).

Selon les informations précédentes, il importe de discuter dès que possible avec les personnes qui utilisent des opioïdes de l’effet de leur consommation sur leurs obligations religieuses ou spirituelles, de sorte à les sensibiliser rapidement aux répercussions potentielles de l’utilisation d’opioïdes sur leur bien-être spirituel.

Réactions émotionnelles à l’utilisation d’opioïdes

Des études qualitatives sur les expériences d’utilisation d’opioïdes ont relevé des effets positifs et négatifs de l’utilisation de drogues; cependant, les effets positifs tendent à surpasser les négatifs (Brooks, Unruh et Lynch, 2015).

À NOTER : Comparativement aux effets physiologiques des opioïdes, les émotions négatives liées à l’utilisation d’opioïdes étaient grandement associées à des aspects socioculturels.

Une étude qualitative menée auprès de 21 adultes afro-américains atteints de l'anémie falciformet traités avec des opioïdes sur ordonnance a décrit leur expérience de la manière suivante (Alsalman, Wong, Posner et Smith, 2013) :

  • Sentiments négatifs :
    • culpabilité;
    • isolement;
    • dépendance par rapport aux autres;
    • impression d’avoir subi une diminution des capacités cognitives;
    • peur des conséquence; et
    • rancune envers les prestataires de soins de santé et de services sociaux.
  • Sentiments positifs :
    • impression d’avoir été libéré d’un mode de vie centré sur la douleur; et
    • évasion de la pitié ou de la sympathie.
  • La gestion de la douleur avec les opioïdes a eu des effets positifs et négatifs sur :
    • les relations;
    • l’humeur;
    • les activités de la vie quotidienne et le fonctionnement;
    • la productivité à l’école ou au travail;
    • le respect des obligations sociales ou spirituelles; et
    • la vision générale du monde.

Selon une étude qualitative menée au Canada, neuf participants âgés de 40 à 68 ans ont eu de la difficulté à trouver l’équilibre entre les effets négatifs des opioïdes, le soulagement de la douleur et l’amélioration du fonctionnement au quotidien (Brooks, Unruh et Lynch, 2015). ). Voici ce que les participants ont ressenti :

  • une hésitation à entreprendre un traitement par opioïdes pour la gestion de la douleur chronique;
  • une impression d’avoir retrouvé une qualité de vie perdue;
  • une fatigue, une lenteur et, parfois, un manque de motivation;
  • un sentiment d’être stigmatisé par l’image des personnes qui utilisent des opioïdes véhiculée par les médias;
  • une impression d’être un « junkie » aux yeux des professionnels de la santé et des services sociaux;
  • une culpabilité liée à l’utilisation d’opioïdes;
  • une peur de devenir dépendant et/ou de se faire voler;
  • un sentiment d’isolement, comme s’ils gardaient un secret; et
  • une reconnaissance quant au soulagement de la douleur fourni par les opioïdes.

Effets mentaux et psychologiques de l’usage d’opioïdes

Bien qu’ils ne représentent que 16 % de la population, les adultes souffrant de trouble de santé mentale aux États-Unis comptent pour 51 % de toutes les ordonnances d’opioïdes au pays (Davis, Lin, Liu et Sites, 2017).

Il existe trois hypothèses mutuellement exclusives quant à la relation entre l’utilisation d’opioïdes sur ordonnance à des fins non médicales et les troubles de l’humeur et les troubles anxieux :

  1. Hypothèse de précipitation : l’utilisation d’opioïdes sur ordonnance à des fins non médicales peut entraîner l’apparition d’un trouble de l’humeur ou d’un trouble anxieux.
  2. Hypothèse d’automédication : les personnes atteintes d’un trouble de l’humeur ou d’un trouble anxieux sont plus susceptibles de « s’automédicamenter » en utilisant des opioïdes sur ordonnance à des fins non médicales.
  3. Hypothèse de vulnérabilité réciproque : chaque facteur augmente la vulnérabilité à l’autre.

Une étude américaine a révélé que les adultes souffrant de troubles de santé mentale (troubles anxieux et troubles de l’humeur) étaient plus susceptibles d’utiliser des opioïdes et de continuer des traitements aux opioïdes à long terme (Davis, Lin, Liu et Sites, 2017).

  • L’usage d’opioïdes pour de longues périodes (soit plus de 30 jours) pourrait possiblement augmenter le risque de dépression.
  • L’utilisation à vie d’opioïdes sur ordonnance à des fins non médicales était associée à l’incidence de trouble dépressif majeur, de trouble bipolaire et de troubles anxieux (dont le trouble d’anxiété généralisé) (Martins et. al., 2012).

Ces conclusions démontrent que l’amélioration de la gestion de la douleur est particulièrement cruciale chez les personnes qui présentent aussi un trouble de santé mentale, notamment un trouble de l’humeur ou un trouble anxieux.

Effets physiques à court et à long terme de l’usage d’opioïdes

Une dose quotidienne élevée d’opioïdes sur ordonnance est associée à un risque plus élevé de surdose et d’importants problèmes de santé, notamment de fractures, de dépendance aux opioïdes, d’occlusion intestinale et de sédation.

Les personnes qui utilisent des opioïdes rapportent des effets à court terme, dont :

  • des nausées;
  • des vomissements;
  • de l’urticaire;
  • de la constipation;
  • de la somnolence;
  • des sautes d’humeur;
  • de la transpiration; et
  • des altération des fonctions sexuelles, comme la dysfonction érectile chez les hommes.

L’utilisation prolongée d’opioïdes a des effets physiques indésirables sur :

  • le système respiratoire (troubles respiratoires du sommeil, comme l’apnée du sommeil et l’hypoxémie, pneumonie et dépression respiratoire);
  • le système gastro-intestinal (constipation, occlusion gastro-intestinale);
  • le système musculo-squelettique (risque accru de chutes et de fractures, surtout chez les adultes plus âgés);
  • le système cardiovasculaire (hypotension, bradycardie, infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque);
  • le système immunitaire (effets immunosuppresseurs);
  • le système endocrinien (dysfonction sexuelle, infertilité, fatigue, syndrome métabolique, insulinorésistance);
  • le système nerveux central (étourdissements, sédation, dépression clinique).

Il a été suggéré que le traitement par opioïdes à long terme est associé à une hausse de 87% de la mortalité, toutes causes confondues (Baldini, Von Korff et Lin, 2012).

Questions menant à la réflexion

Maintenant que vous avez lu ce contenu, considérez la question suivante :

Comment la douleur peut être vécue différemment chez les personnes ayant un trouble de santé mentale concomitant?

Prenez en considération à la fois les enjeux reliés à la gestion de la douleur et les émotions associées aux éléments socioculturels de l’utilisation d’opioïdes.

Questions

En moyenne, les personnes qui utilisent des opioïdes ont indiqué que les effets positifs surpassent généralement les effets négatifs.


Sur combien de systèmes physiologiques l’utilisation prolongée d’opioïdes peut-elle avoir des répercussions?


Références

Alsalman, A., Wong, J. L., Posner, B. et Smith, W. (2013). Impact of prescribed opioids on biopsychosocial-spiritual function in patients with sickle cell disease: A multi-phase, mixed methods study. The Journal of Pain, 14(4), p. S76.

Baldini, A., Von Korff, M. et Lin, E. H. (2012). A review of potential adverse effects of long-term opioid therapy: A practitioner’s guide. The primary care companion to CNS disorders, 14(3).

Brooks, E. A., Unruh, A. et Lynch, M. E. (2015). Exploring the lived experience of adults using prescription opioids to manage chronic noncancer pain. Pain Research and Management, 20(1), pp. 15–22.

Davis, M. A., Lin, L. A., Liu, H. et Sites, B. D. (2017). Prescription opioid use among adults with mental health disorders in the United States. The Journal of the American Board of Family Medicine, 30(4), pp. 407–417.

Dugosh, K., Abraham, A., Seymour, B., McLoyd, K., Chalk, M. et Festinger, D. (2016). A systematic review on the use of psychosocial interventions in conjunction with medications for the treatment of opioid addiction. Journal of addiction medicine, 10(2), p. 91.

Edlund, M. J., Harris, K. M., Koenig, H. G., Han, X., Sullivan, G., Mattox, R. et Tang, L. (2010). Religiosity and decreased risk of substance use disorders: is the effect mediated by social support or mental health status? Social Psychiatry and Psychiatric Epidemiology, 45(8), pp. 827–836.

Gomes, T., Mamdani, M. M., Dhalla, I. A., Paterson, J. M. et Juurlink, D. N. (2011). Opioid dose and drug-related mortality in patients with nonmalignant pain. Archives of Internal Medicine, 171(7), pp. 686–691.

Heinz, A. J., Disney, E. R., Epstein, D. H., Glezen, L. A., Clark, P. I. et Preston, K. L. (2010). A focus-group study on spirituality and substance-user treatment. Substance Use & Misuse, 45(1–2), pp. 134–153.

Martins, S. S., Fenton, M. C., Keyes, K. M., Blanco, C., Zhu, H. et Storr, C. L. (2012). Mood and anxiety disorders and their association with non-medical prescription opioid use and prescription opioid-use disorder: Longitudinal evidence from the National Epidemiologic Study on Alcohol and Related Conditions. Psychological Medicine, 42(6), pp. 1261–1272.

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